Légionnaires romains chez les Lingons : la VIIIème Augusta à Mirebeau (Côte-d’Or)

Résumé

Par les tuiles à estampilles ramassées dans les champs et par les photographies aériennes et les fouilles réalisées depuis 1964, la présence de la VIIIème Légion à Mirebeau est avérée. Les légionnaires construisirent un vaste camp à remparts, portes, principia, magasins, thermes, amphithéâtre et d’après les dernières données, débarcadère sur la Bèze et peut-être nécropole. Sa présence ne dépassa pas une vingtaine d’années sous les Flaviens alors qu’en amont s’était développé un important sanctuaire celtique, puis gallo-romain. Une agglomération civile a perduré à l’emplacement du village actuel, au carrefour de voies antiques et avec un théâtre qui, tombant en ruines, fut restauré par la fille d’un citoyen romain.

Mirebeau : angle sud du rempart et horrea (photo de René Goguey, 28/06/1992)

Mirebeau : angle sud du rempart et horrea (photo de René Goguey, 28/06/1992)

Introduction

À l’inverse d’Alésia, directement liée à l’histoire de la Gaule, le site de Mirebeau est mal connu du public alors qu’il occupe une place de premier plan dans l’archéologie celtique et dans l’archéologie militaire romaine. N’ayant pas de nom – celui-ci n’a pas encore été découvert – on n’en trouve pas trace dans les textes antiques. Au XIXe siècle, les archéologues locaux, alertés par les découvertes fortuites, ont épilogué sur le séjour de la VIIIème Légion. Mais aucune fouille sérieuse n’a été organisée. C’est la photographie aérienne du site en 1964 qui en a donné aussi bien une image d’ensemble que le détail de ses principaux éléments.

Après les campagnes de fouilles de 1968-1990, la publication Le camp légionnaire de Mirebeau (GOGUEY, REDDÉ, 1995) fit le point des connaissances et un colloque organisé à Luxembourg fut consacré aux canabae. La disparition de C. M. Ternes en arrêta la publication qui est partiellement reprise ici. La poursuite des prospections, la numérisation et le traitement informatique d’un ensemble exceptionnel de photographies aériennes qui n’avaient pu bénéficier de ces techniques firent apparaître de nouvelles données qui sont présentées dans cet article.

La découverte aérienne, en 1973, d’un important sanctuaire celte et gallo-romain donna un nouvel éclairage sur Mirebeau. Les fouilles furent menées à partir de 1977 par R. Goguey (GOGUEY, 1980, p. 169-209), continuées en 1981 par J.-P. Guillaumet et Ph. Barral (BRUNAUX, 1985, p. 79-112 ; JOLY, 1986, p. 48-53), puis reprises en sauvetage par l’INRAP (VENAULT, 2006, p. 334-335) et en chantier-école de la Sorbonne depuis 2001 (JOLY, BARRAL, 1986). Elles montrent que le sanctuaire et une agglomération, celtique puis gallo-romaine, constituèrent le point fort de la région. L’implantation, sous les Flaviens, d’un monumental camp de la VIIIème Légion et de ses annexes resta sans véritable lendemain lorsque celle-ci le quitta pour s’installer près du Rhin, à Strasbourg.

A : Mirebeau dans son environnement. B : La voie Mirebeau/Vaux-sous-Aubigny.

A : Mirebeau dans son environnement. B : La voie Mirebeau/Vaux-sous-Aubigny.